Le mois dernier, Greenpeace révélait le rôle d’HSBC dans le financement d’entreprises du secteur de l’huile de palme qui détruisent les forêts indonésiennes. Plus de 200 000 personnes ont signé la pétition et des milliers d’e-mails ont été envoyés au PDG d’HSBC pour que la banque arrête de financer la déforestation.
HSBC est d’abord resté assez silencieuse… Puis a commencé à répondre. Si vous lui écrivez, vous recevrez peut-être cette réponse, que nous avons décryptée pour vous. Encore une fois, HSBC ne semble pas prendre la mesure de la gravité des actes de certaines entreprises qu’elle finance, et avance des affirmations sans apporter de preuves tangibles.
Excellente nouvelle ! Nous sommes tous d’accord pour dire que la déforestation en Indonésie est préoccupante.
« L’industrie de l’huile de palme est très complexe, avec un grand nombre d’entreprises impliquées dans la culture, le raffinage, le transport et la consommation de l’huile de palme, qui est un produit d’exportation précieux ainsi qu’un aliment important pour de nombreuses personnes à travers l’Asie. »
L’industrie de l’huile de palme est en effet très complexe. C’est pourquoi chaque entreprise impliquée dans cette industrie, y compris les banques, doit s’engager clairement à ne pas faire affaire avec les sociétés qui détruisent les forêts. Les banques comme HSBC doivent être transparentes sur leurs clients et ce qu’ils font, et s’assurer que leurs politiques environnementales sont respectées. Sinon il est très facile pour les entreprises financées d’agir dans l’opacité et de continuer à avoir des pratiques destructrices.
« Le défrichage des forêts tropicales et les mauvais traitements infligés aux populations locales constituent un problème important depuis de nombreuses années. C’est pourquoi nous avons adopté notre première politique forestière en 2004 pour limiter notre exposition à l’utilisation non durable des terres forestières. »
C’est bien qu’HSBC reconnaisse que des politiques ambitieuses sont nécessaires pour protéger les forêts tropicales. Malheureusement, les politiques actuelles d’HSBC ne sont pas à la hauteur, et la banque ne semble pas les appliquer. Notre enquête a montré qu’HSBC a prêté des millions à des entreprises qui ne respectent pas ses politiques actuelles.
« En 2014, nous avons révisé notre politique en consultant plusieurs ONG, dont Greenpeace, sur les normes que nous devrions utiliser pour encadrer notre financement du secteur de l’huile de palme. »
Nous avons effectivement commenté les projets de politique d’HSBC en 2014, mais encore eût-il fallu que cette participation soit prise en compte. HSBC a choisi d’ignorer la plupart de nos commentaires, refusant par exemple d’exclure les entreprises qui détruisent les tourbières. HSBC n’a pas suivi nos recommandations pour adopter une politique empêchant réellement la destruction des forêts et de la biodiversité en Indonésie, et c’est pourquoi nous faisons aujourd’hui campagne pour que sa politique soit améliorée.
« Ces normes sont énoncées dans notre politique sur les produits agricoles et exigent de nos clients qu’ils fassent partie du programme de certification de la Table ronde sur l’huile de palme durable [RSPO] et qu’ils certifient une de leurs unités de gestion d’ici décembre 2014. Nous avons précisé que si nos clients ne répondaient pas à ces exigences, nous ne ferions plus affaire avec eux. En conséquence, nous avons décidé d’arrêter de financer 104 clients du secteur de l’huile de palme. »
104 clients exclus, ça donne l’impression que la banque a été sévère, mais en réalité on ne sait pas qui ils sont, ni combien d’autres clients, eux, sont restés. Tant qu’HSBC agira dans l’opacité et refusera de communiquer le nom des entreprises financées, nous ne pourrons pas lui faire confiance aveuglément.
« Nous demandons également à tous nos clients du secteur de l’huile de palme d’avoir 100% de leurs activités certifiées par la RSPO d’ici fin 2018. »
Les normes de la RSPO sont très insuffisantes et n’interdisent pas la déforestation. Beaucoup de membres de la RSPO violent systématiquement ces normes sans craindre de sanctions. Compter sur la RSPO pour établir des standards sur la culture de l’huile de palme n’est pas un bon début. Les politiques « Zéro Déforestation », qui incluent des standards environnementaux et sociaux bien plus ambitieux que ceux de la RSPO, sont en train de devenir la nouvelle norme du secteur et ont déjà été adoptées par de nombreux acteurs. HSBC doit se mettre à niveau et aligner ses exigences sur les normes « Zéro Déforestation »
« Alors que pour de nombreuses entreprises, il s’agit d’un délai difficile à respecter, nous nous réjouissons de constater que via notre engagement avec le plus haut niveau de direction de ces entreprises, un nombre croissant de sociétés du secteur de l’huile de palme travaillent au respect de cet objectif. »
Cinq des six compagnies d’huile de palme mentionnées dans notre rapport ont déclaré qu’elles ne respecteraient pas cette échéance pour faire certifier leurs activités par la RSPO. La dernière n’est même pas membre de la RSPO (ce qui constitue une violation de la politique d’HSBC sur le financement de l’huile de palme). Combien d’autres clients HSBC ne respecteront pas non plus cet engagement ?
« C’est une bonne nouvelle pour les forêts et les personnes qui y vivent ou y travaillent, car la certification RSPO empêche la déforestation et exige un traitement équitable de la population locale et de la main-d’œuvre. Nous croyons que c’est un exemple de contribution positive d’HSBC à la société. »
C’est totalement faux. La certification RSPO n’empêche pas la déforestation et ne signifie pas qu’une entreprise traite bien ses salariés ou la population locale. Des membres de la RSPO, dont beaucoup de clients d’HSBC, ont été notoirement impliqués dans la destruction de forêts et de tourbières, ou dans le recours au travail forcé ou au travail des enfants.
« L’alternative serait de se retirer du secteur de l’huile de palme, perdant ainsi l’influence et la capacité à encourager de meilleures pratiques. Nous avons discuté de cette option avec Greenpeace et ils sont d’accord avec nous pour dire qu’il vaut mieux rester en contact avec les leaders du secteur de l’huile de palme, qui ont obtenu la certification RSPO, que de s’en aller. »
Oui, HSBC peut continuer à financer des entreprises du secteur de l’huile de palme à condition que celles-ci soient responsables. Mais pour cela, la banque doit renforcer ses politiques et s’assurer que ses clients les respectent. Elle doit également faire preuve de transparence pour que nous puissions constater cet engagement. Et encore une fois, la certification RSPO n’est en aucun cas une garantie suffisante.
« En ce qui concerne les détails du rapport de Greenpeace, j’aimerais attirer votre attention sur les dates des prêts qu’ils énumèrent, dont beaucoup sont antérieurs à notre politique de 2014. »
Pour les prêts consentis avant 2014, nous avons pris en compte la politique antérieure d’HSBC, qui date de 2008. Les sociétés en question ne la respectaient pas non plus.
« Notre devoir de confidentialité vis-à-vis de nos clients signifie que nous ne pouvons ni confirmer ni infirmer si les sociétés visées sont des clients d’HSBC … »
HSBC semble sous-entendre qu’elle est légalement tenue de maintenir la confidentialité de ses clients au point de refuser de confirmer ou d’infirmer leur identité. La banque nous a renvoyés vers les lois britanniques (le siège d’HSBC étant à Londres) qui interdisent de divulguer des détails sur les comptes des clients. S’il est effectivement interdit de donner des détails sur les comptes d’un client – dire par exemple qu’il est à découvert – il n’est pas évident de comprendre en quoi HSBC interprète cela comme une interdiction de confirmer ou non un prêt à une entreprise du secteur de l’huile de palme, sachant qu’une partie de ces informations est déjà dans le domaine public, et que de nombreuses banques mentionnent certains projets financés dans leur communication publique. Dans le cas où il s’agit de dire qu’une entreprise n’est plus cliente d’HSBC, cette opacité est tout aussi incompréhensible.
En outre, même les lois citées par HSBC ont des exceptions. Par exemple, une banque peut révéler des informations si c’est dans son intérêt ou si elle a le consentement du client. Elle peut divulguer des informations si les rendre publiques est dans l’intérêt général. Nous considérons qu’il est d’intérêt général qu’HSBC explique qui sont ses clients du secteur de l’huile de palme et comment elle travaille avec eux pour mettre fin à la déforestation.
« … mais après avoir examiné ce rapport en détail, nous ne sommes pas au courant de cas où des clients auraient agi sans respecter notre politique et où nous n’avons pas pris ou ne sommes pas en train de prendre de mesures appropriées. »
Si HSBC ne savait pas que certains de ses clients ne respectaient pas sa politique, alors ses mécanismes de suivi sont insuffisants. La plupart des problèmes que nous exposons dans notre rapport avaient déjà été publiquement dénoncés (rapports d’ONG, plaintes officielles…).
HSBC ne peut pas se contenter de nous demander de lui faire confiance alors que nous avons des preuves que des entreprises qu’elle finance détruisent la forêt et ne respectent même pas ses politiques actuelles qui sont pourtant insuffisantes. Tant que nous ne saurons pas quelle action HSBC a engagé avec quelle société, nous ne pourrons pas croire la banque sur parole.
« J’espère que vous aurez trouvé cette explication de notre approche du secteur de l’huile de palme utile. HSBC n’a aucun intérêt à financer des clients impliqués dans des activités illégales; des incendies de forêts, la conversion de zones de haute valeur de conservation, le travail des enfants ou le travail forcé, la violation des droits des communautés locales (dont le principe du consentement préalable, libre et informé), et des activités générant un conflit social important. »
Cette liste reprend les activités qu’HSBC s’interdit de financer dans sa politique sur les produits agricoles. Nos recherches montrent que chacune de ces interdictions a été violée par un ou plusieurs clients d’HSBC dans les cinq dernières années. Si HSBC veut affirmer le contraire, elle doit commencer à nous fournir des preuves de ce qu’elle avance. HSBC semble avoir beaucoup de chemin à parcourir avant de comprendre à quel point elle est à la traîne par rapport à de nombreux acteurs du secteur de l’huile de palme. Et nous continuerons à nous mobiliser jusqu’à ce qu’elle rattrape son retard.
Si vous n’avez pas encore signé notre pétition pour demander à HSBC d’arrêter de mettre les forêts indonésiennes à découvert, c’est ici.
Vous pouvez également envoyez un e-mail à Stuart Gulliver, le PDG d’HSBC, en copiant-collant par exemple le texte ci-dessous et en l’envoyant à stuart.t.gulliver@hsbc.com
Monsieur Gulliver,Je suis choqué(e) d’apprendre qu’HSBC finance des entreprises du secteur de l’huile de palme qui détruisent les forêts indonésiennes.
La déforestation entraîne des incendies qui sont à l’origine de milliers de morts chaque année. Les orangs-outans sont au bord de l’extinction. La biodiversité et le climat sont menacés.
HSBC prétend que le développement durable est au cœur de ses priorités. Votre banque doit arrêter de financer la destruction des forêts !
N’hésitez pas aussi à interpeller la banque sur sa page Facebook officielle en commentant ses publications avec le message ci-dessous :
HSBC, vos liens avec des entreprises qui détruisent les forêts indonésiennes sont inacceptables. Vous devez être transparents et mettre fin à cette situation. Arrêtez de financer la destruction des forêts ! https://secure.greenpeace.org.uk/page/content/hsbc-petition-share-donate